En ce moment : Beautiful Things - Benson Boone Ecouter la radio

En ce moment
abonnement

Lahore (Pakistan) (AFP). Le Pigalle pakistanais se meurt, victime d'Internet

Le plus ancien quartier chaud du Pakistan fut pendant des siècles un Pigalle moghol au coeur de Lahore où cohabitaient danseuses érotiques, musiciens et prostituées. Mais avec l'avènement des réseaux sociaux qui a bouleversé le commerce du sexe, le quartier historique d'Heera Mandi est à l'agonie.

Lahore (Pakistan) (AFP). Le Pigalle pakistanais se meurt, victime d'Internet
Une prostituée du quartier chaud de Lahore esquisse des pas de danse, le 4 mai 2016 - AFP

Il n'y a plus personne sur les balcons ouvragés où se montraient des femmes splendidement parées, et la rouille dévore les verrous scellant les salles où elles se produisaient en rez-de-chaussée.

Seuls subsistent quelques magasins d'instruments de musique, car des musiciens accompagnaient autrefois le préambule dansé des belles.

Aujourd'hui, les hommes peuvent organiser un rendez-vous tarifé en ligne, via des sites d'escort girls, ou directement sur les réseaux sociaux, au lieu d'écumer les rues de quartiers rouges.

La prostitution peut s'exercer n'importe où et même des travailleuses du sexe traditionnelles comme Reema Kanwal --qui dit avoir ce métier "dans le sang"-- ont abandonné Heera Mandi.

Le quartier, dont le nom signifie "marché des diamants", est un dédale de rues poussiéreuses près de la majestueuse mosquée Badshahi, joyau architectural de l'empire moghol.

Sous le règne de ces empereurs musulmans qui ont dirigé le sous-continent indien à partir du XVIe siècle, Heera Mandi était un haut-lieu pour les mujras, ces spectacles de danse et de musique traditionnelles destinés à l'élite.

Les fils de bonne famille y étaient confiés à des tawaifs, des courtisanes aux talents comparables à ceux des geishas, pour acquérir les subtilités de l'étiquette.

- Décadence -

Après une longue décadence, l'arrivée des colons anglais et de leur puritanisme victorien a scellé le sort des courtisanes et danseuses, reléguées au rang de simples prostituées.

Reema se souvient malgré tout de jours "glorieux". Sa mère et sa grand-mère, également prostituées, font partie de ces générations de femmes de Heera Mandi ayant dansé et assouvi le désir des hommes dans le quartier.

"Les gens autrefois respectaient les prostituées de Heera Mandi, nous étions considérées comme des artistes", dit-elle. Mais tout a changé ces dix dernières années. "Nous n'avons plus aucune considération désormais".

La faute selon elle à un afflux de filles n'ayant pas son hérédité, qui exercent la profession sans avoir été formées à "soigner les gens" comme elle l'a été.

Ces filles n'ont besoin de rien d'autre pour se vendre que d'un téléphone portable, avec lequel elles peuvent s'afficher sur Facebook ou sur le site de petites annonces Locanto. Certaines offrent des services via Skype pour seulement 300 roupies (2,5 euros).

Des dizaines de sites proposent des filles sur réservation à Karachi, Lahore ou Islamabad.

- 'Jours difficiles' -

Car le commerce du sexe est florissant au Pakistan, même si la prostitution et le sexe hors mariage sont théoriquement illégaux dans ce pays musulman profondément conservateur. L'un de ces sites internet proposant des filles affirme ainsi compter 50.000 clients.

Par ricochet, Internet et le recul des traditions ont chamboulé la vie des musiciens du quartier de Heera Mandi: les prostituées n'ont aujourd'hui plus besoin de musiciens ni de professeurs.

Autrefois, les chorégraphies sophistiquées présentées lors des mujras nécessitaient des années de formation et un groupe de musiciens sur scène. Mais aujourd'hui, il suffit de quelques déhanchés provocateurs appris grâce à des vidéos en ligne.

"Elles prennent une clé USB, parfois elles ont juste des chansons dans leur téléphone portable, elles branchent un câble et mettent la musique en route", se lamente Soan Ali, un vendeur d'instruments.

Comme la famille de Reema, celle d'Ali est installée à Heera Mandi depuis des générations. Le musicien se rappelle avec fierté "l'hospitalité" de son père lorsque celui-ci aguichait des clients pour le compte de sa mère.

"La vie est devenue très difficile", admet-il. "Tous ceux qui sont dans ce secteur traversent des jours difficiles".

- 'Heera Mandi n'est plus' -

Le commerce du sexe fleurit hors de Heera Mandi.

Mehak, qui ne se présente pas sous son vrai nom, est une quinquagénaire élégante, chirurgienne esthétique de jour, mère maquerelle la nuit dans les plus hauts cercles de la société pakistanaise.

Sept chats persans soyeux occupent le luxueux canapé de son domicile, qui sert aussi de maison close pour de riches Pakistanais dans un quartier aisé de Lahore.

Mehak indique recruter la plupart des filles travaillant pour elle lors de fêtes de l'élite pakistanaise -- mais reconnaît que "tous ces trucs en ligne ont vraiment changé le marché".

"Une fille n'a plus besoin d'un maquereau pour la vendre, elle a Facebook, Twitter", reconnaît-elle.

"Heera Mandi n'est plus... même si une fille vient de Heera Mandi, elle ne le dira jamais car le client n'accepterait pas le risque de maladies sexuellement transmissibles et la mauvaise image associés à ce quartier".

Les clients ne cherchent plus des danseuses issues de lignées de prostituées, souligne Mehak: "les étudiantes en médecine et les diplômées en gestion des affaires sont les plus recherchées, elles peuvent gagner jusqu'à 100.000 (roupies, soit 850 euros) pour une nuit".

Cette mère maquerelle compte développer son commerce en proposant des relations tarifées avec des hommes. Car "des filles de l'élite viennent me réclamer des garçons", explique-t-elle. "Elles disent être prêtes à payer, mais elles veulent des garçons forts."

Newsletter
Restez informé ! Recevez des alertes pour être au courant de toutes les dernières actualités.
Pour aller plus loin
Réagir à cet article

L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.

En direct
Lire les journaux
Petites Annonces
Immobilier
Caen, à louer studette meublée, 13 m2
Caen, à louer studette meublée, 13 m2 Caen (14000) 360€ Découvrir
Gîte
Gîte Sainte-Mère-Eglise (50480) 67€ Découvrir
Bretagne, 22 - Plestin-les-Grèves St-Efflam, loue face à la
Bretagne, 22 - Plestin-les-Grèves St-Efflam, loue face à la Plestin-les-Grèves (22310) 0€ Découvrir
Garage / Box / Garde-meuble
Garage / Box / Garde-meuble Agnac (47800) 60€ Découvrir
Automobile
Renault Megane
Renault Megane Coutances (50200) 2 000€ Découvrir
Vends Mercedes Classe A
Vends Mercedes Classe A Argences (14370) 29 000€ Découvrir
Tiguan
Tiguan Hérouville-Saint-Clair (14200) 9 900€ Découvrir
Urgent, vends Peugeot 407
Urgent, vends Peugeot 407 Saint-Aubin-du-Cormier (35140) 1 300€ Découvrir
Bonnes affaires
Vide maison
Vide maison Cauvicourt (14190) 0€ Découvrir
Armoire ancienne
Armoire ancienne Caen (14000) 0€ Découvrir
Pots de buis
Pots de buis Caen (14000) 0€ Découvrir
Machine à coudre Singer
Machine à coudre Singer Saint-Etienne-du-Rouvray (76800) 75€ Découvrir
L'application mobile de Tendance Ouest
Inscrivez vous à la newsletter
La météo avec Tendance Ouest
Les pronostics avec Tendance Ouest
Votre horoscope du jeudi 28 mars
Les jeux de Tendance Ouest
L'emploi avec Tendance Ouest
Films et horaires dans vos cinémas en Normandie
L'agenda des sorties de Tendance Ouest
Les concerts avec Tendance Ouest
Les replays de Tendance Ouest
Lahore (Pakistan) (AFP). Le Pigalle pakistanais se meurt, victime d'Internet